Qui essaime ?

Marilyn Baldeck

Diplômée en sciences sociales et politiques de l’Institut Français de Presse, Marilyn Baldeck a finalement trouvé dans le droit son outil de prédilection. Pendant 15 ans elle a contribué, dans le milieu associatif, aux procédures judiciaires qui ont forgé la jurisprudence relative au harcèlement sexuel. Elle a initié ou participé aux principales réformes législatives sur le sujet au cours des deux dernières décennies.

En mars 2024, elle crée ESSAIMER pour porter collectivement les projets qu’on lui confie, et pour continuer à diffuser ce que le soutien aux victimes – qui reste le cœur de son engagement, notamment au sein de La Collective Des Droits – lui apprend au fil du temps.

Marilyn Baldeck intervient dans plusieurs cursus universitaires et formations professionnelles, notamment :

  • le Diplôme Universitaire Violences faites aux femmes de l’Université Paris 8,
  • le certificat de spécialisation en psychopathologie du travail de l’Institut de Psychodynamique du Travail de Paris,
  • le Master 2 de médecine légale et sociale et le DU Violence et santé de l’Université Sorbonne Paris Nord,
  • la formation de direction d’exploitation cinématographique de la FEMIS.
  • la formation management de production de l’école ARTFX, schools of digital arts

Une obsession en lien avec ton travail ?

“Je peux passer des heures à lire des décisions de justice, parfois même sur des sujets assez éloignés de mon domaine habituel. J’y découvre les “histoires” qu’elles recèlent, elles m’attristent et me mettent en colère et provoquent beaucoup d’admiration pour ces personnes que je ne connais pas et qui ont eu le courage d’affronter la justice. Je suis également passionnée par la manière dont les juges font tenir ces “histoires” dans un raisonnement juridique.

Au-delà des principes que la jurisprudence édicte, en formation, j’ai souvent envie de partager ce cheminement.

Je pense que c’est aussi comme ça, par la narration, que l’on s’approprie les concepts. C’est évidemment également utile pour les enquêtes internes.”

Une formation mal partie qui s’est bien terminée ?

“Erreur de planning, j’étais arrivée avec une heure d’avance. C’est mieux dans ce sens-là ! Personne ne savait que j’étais la formatrice. Installée à proximité de la machine à café, j’entendais mes futurs stagiaires râler à cause de la formation à laquelle ils et elles avaient été convoqué.es, “obligatoire”, “trop longue”, “infantilisante”, “à la mode” etc. Je me suis dit que la journée allait être longue… J’ai démarré la formation en faisant un florilège de ce qui j’avais entendu, ce qui a finalement détendu l’atmosphère. A la fin de la formation, tout le monde trouvait que c’était trop court”

Ton point fort en formation ?

“J’ai commencé il y a 20 ans à former de manière assez artisanale, sans support projeté. J’avais quelques lignes directrices en tête, qui correspondaient à mes objectifs pédagogiques et un dossier papier sous le bras, qui contenait des articles de presse, de la jurisprudence, des récits de victimes, classés par thématiques avec des post-its dessus. Je m’appuyais ensuite sur le groupe, les savoirs déjà présents, ses attentes.

Et ça fonctionnait pas mal ! Puis il a fallu professionnaliser la formation et pour beaucoup, professionnalisation équivalait à « powerpoint ». Aujourd’hui, je suis revenue à une pratique plus proche de celles de mes débuts, tout en m’offrant une formation approfondie à la pédagogie en 2024 (avec l’excellente Marine Dumoulin), qui m’a ouvert le champs des possibles.

Plus j’avance en expérience et plus j’envisage la formation comme une expérience de lâcher -prise : je suis moins là pour diffuser des savoirs que pour impulser une dynamique de groupe ”

Un mot d’ordre sur les enquêtes internes ?

Plutôt une méthode, une posture : “Penser contre soi-même” et se laisser surprendre. La « neutralité » ? Un vœu pieux. Si on se convainc qu’on est neutre, on ne se donne justement pas la peine de corriger ses biais pour être impartiale et respecter le principe du contradictoire de manière scrupuleuse.

Léa Scarpel

Léa Scarpel a roulé sa bosse pendant 15 ans dans la protection des droits fondamentaux, en particulier la lutte contre les violences faites aux femmes, au Mexique, en Inde, en Espagne, à Bruxelles, dans la région Euro-méditerranéenne, pour le compte d’ONG ou d’institutions internationales.

Revenue en France en 2018, elle a d’abord été formatrice sur les violences conjugales, puis juriste à l’AVFT, où elle a pu, pendant 7 ans, frotter son parcours d’historienne et de juriste en droit international au contact de ce terrain. Si elle peut se déplacer partout, elle couvre plus particulièrement les régions Auvergne-Rhône-Alpes et PACA pour Essaimer.

Ce que tu aimes le plus en formation ?

“Apprendre” ! Que ce soit au travers des questions posées, les différences de niveaux à laquelle il faut s’adapter, les retours post formation, j’apprends toujours énormément. J’adore la formation comme espace de rencontre, d’échange, d’immersion dans des espaces de vie et professionnels différents. La formation me pousse à m’adapter, réfléchir à de nouvelles méthodologies.

J’aime également jongler entre la théorie, ce que nous dit le droit, et la traduction de ces dispositions juridiques dans le réel, en partageant le vécu des victimes de violences que j’ai accompagnées dans leurs démarches et procédures.

Ton point fort en formation ?

“Je me suis tellement ennuyée sur les bancs de la fac à écouter des professeurs parler pendant des heures en déroulant leur contenu que dès que je suis devenue formatrice, j’ai cherché à m’en éloigner !

J’ai toujours trouvé qu’en tant que stagiaire, il n’y avait rien de plus frustrant et bloquant que de recevoir un prêt à prêt-à-penser qui ne laisse pas la place à un cheminement individuel et à une dynamique de réflexion collective (d’autant plus sur la question des violences sexistes et sexuelles et des discriminations où les idées reçues et stéréotypes sont légion !).

Une formation est pour moi réussie lorsque chaque stagiaire se sent en confiance et pris au sérieux, et ainsi légitime à se positionner, partager ses questionnements et s’engager dans le sujet. J’aime faire réagir et participer, m’écarter un temps du déroulé prévu lorsque c’est nécessaire afin de créer des espaces de débats impromptus pour répondre à une attente en particulier, encourager le partage de pratiques, ou déconstruire une résistance.”

Une expérience de formation que tu aimerais partager ?

“Lors d’une réunion préparatoire d’un cycle de sensibilisations à destination d’agent.es de restauration et d’entretien, on m’annonce que je risque de faire face à un public difficile : « public très éloigné du sujet », « qui n’a pas l’habitude de prendre la parole en public », « qui n’est pas habitué à rester assis et concentré ».

Il est habituel dans notre métier de faire face à des personnes réfractaires. Et ceci quel que soit le milieu socio-professionnel du public concerné !

Au final, ce furent des sessions avec beaucoup de participation, de questions, et un niveau d’attention particulièrement élevé. J’avais connu des sessions tellement plus compliquées, y compris auprès de cadres, ingénieurs ou de professionnel.le.s de santé.

Clarisse Feletin

Titulaire d’une maîtrise de droit, diplômée de Science Po Paris et du Centre de Formation des Journalistes, Clarisse Feletin a d’abord mis sa passion pour l’investigation et la documentation du réel au service de l’information. Réalisatrice de documentaires multiprimée, elle s’est intéressée à la question du harcèlement sexuel au travail bien avant Metoo, en réalisant en 2012 un documentaire pour France 2 intitulé “sexe, mensonges et harcèlement”.

Elle a par la suite documenté le cas des violences sexistes et sexuelles dans le secteur du nettoyage industriel en sous-traitance et a réalisé un court-métrage de prévention des VSS dans le milieu du cinéma pour le CNC.


Rompue aux techniques d’enquête (entretiens, procédure sérieuse, contradictoire, impartiale et indépendante), elle se sert de son expérience de terrain pour mener des enquêtes internes au sein des entreprises conformément au cadre réglementaire attendu en la matière.

Toute ta carrière a été guidée par l’enquête, sous plusieurs formes (documentaire, enquête interne). Pourquoi ?

S’approcher au plus près de la vérité au travers de la recherche de preuves ou d’un faisceaux d’indices, me passionne. C’est un saut dans l’inconnu, qui oblige à tout questionner, partir d’hypothèses, les confirmer ou les réfuter. Mon moteur est la naïveté, et quand je démarre une enquête, celle-ci n’est pas seulement le fruit d’une posture méthodologique, elle est sincère. Ainsi, je ne me ferme aucune piste et me donne les moyens de comprendre les éléments déclencheurs et les enchaînements.

Une enquête journalistique et une enquête interne, c’est quand même pas la même chose ?

Dans un cas comme dans l’autre, on cherche à documenter le réel.
Dans un cas comme dans l’autre, on interroge des témoins potentiels.
Pour cela, ce sont les mêmes compétences qui sont requises : écoute, empathie, capacité à diriger un entretien, à n’oublier aucune question, à faire repréciser si besoin et à recouper l’information.
Dans un cas comme dans l’autre, la confidentialité est de mise.
Dans un cas comme dans l’autre, la déontologie, mais aussi le cadre juridique (ce que j’ai le droit de faire ou pas pour les besoins de l’enquête) doivent nous servir de guide.

Ce qui diffère radicalement, c’est le rendu : un article ou un film d’un côté susceptible d’être lu ou vu par le plus grand nombre, un rapport d’enquête confidentiel de l’autre.

Maude Beckers

Maude Beckers est avocate depuis 25 ans. Spécialisée en droit du travail et de la discrimination au travail, elle a fait de la lutte contre les violences sexistes et sexuelles au travail et les discriminations le cœur de son activité, en défense des victimes, ou comme conseil des employeurs… si et seulement s’ils ont réellement décidé de faire de la lutte contre ces violences une pierre angulaire de leur politique d’entreprise.

Convaincue que le combat doit passer prioritairement par la prévention, Maude Beckers est également formatrice et assure à ce titre des interventions auprès de divers publics.

Enfin, pour que les cas de violences sexistes et sexuelles se règlent rapidement et efficacement, et afin de préserver les droits des personnes impliquées mais également le climat social, elle a développé depuis plusieurs années une activité d’enquêtrice permettant aux structures confrontées à ces situations de déléguer une mission souvent difficile à réaliser en interne.

En fonction des projets, ESSAIMER coopère avec d’autres cabinets experts
et des consultant.es indépendant.es